“Le point de rentrée :
L’accident
Cet été ma femme s’est tordue la cheville. La chaussée était mal faite, logiquement, c’est de la faute à ceux qui n’ont pas fini leur travail, mais moi je suis un macho, c’est de sa faute à elle. Elle n’avait qu’à ouvrir les yeux.
Alors en bon vieux mal macho que je suis, j’ai eu mon moment de virilité ultime, je l’ai portée pour la transporter de la voiture aux urgences.
Et j’aurais aimé que cette histoire prenne fin à cette séquence, Ah ! la honte, des heures plus tard, une lueur d’espoir, enfin un médecin. Elle se retrouve avec une botte en plâtre et moi je me retrouve avec une femme handicapée et tout sauf autonome. J’ai dû adopter son planning, au bout de deux jours j’ai aussi adopté ses mots, ces petites répliques qui, en général, nous tapent sur les nerfs et auxquels on s’est habitué à réagir par des soupirs et ce depuis notre tendre enfance, parce que ce sont les mêmes que nos propres mères utilisaient. Et c’est là que je réalise à quel point j’ai de la chance, j’apprécie davantage ce rôle que la nature m’a attribué et que la société s’est chargée d’enjoliver, ce rôle qui nous procure fierté et suffisance, ce rôle qui conjugue nos répliques en impératif, le rôle du Maroc au masculin, tel est notre PAYS qu’on aime.
Maudite soit ma femme, par ce que c’est une femme qui m’a habitué à être cet homme.
Séquence 2 :
l’inaccessibilité au quotidien
C’est horrible d’être handicapé dans ce pays. Essayer de traverser avec deux béquilles… heureusement que c’est temporaire.
Mine de rien, plus aucun de ses pantalons n‘avait accès a sa jambe plâtrée, grosse comme un pied d’éléphant, désormais, ça sera jupe courte pour des raisons de sécurité ou sinon short, un short ?? Il ne faut pas trop pousser tout de même, autant une hibernation en plein mois d’août.
Et je me suis lancé dans un flash forward. Par obligation, je suis sensé déposer mon épouse plâtrée en pleine ancienne médina de Rabat pour voir sa grand mère dans une rue sensée être piétonne mais cela n’empêche aucunement le passage des voitures à 50 KM/h, dans la rue Sidi Fateh, désormais tapissée de zellige. Pire, avec cette période des élections, elle est plutôt tapissée de flyers, en 2015 svp !
10 minutes plus tard, 10 mètres plus loin, une voiture qui s’arrête, une petite lueur, enfin un civilisé, et sa voix qui détruit tout espoir, MAYKOUN BASS A ZINE, il lui a fallu quelque fraction de seconde pour réaliser que c’est une BENT LHOUMA et disparaître/
Maudite soit elle, parce qu’elle m’a ouvert les yeux sur toutes ces réalités.
Conclusion
Ce qu’il faut changer, c’est avant tout l’éducation que l’on donne à nos enfants. Apprenons à être un modèle pour les générations futures. Transmettons-leur les vraies valeurs, qu’ils soient libres, responsables et autonomes.
Peut-être faut-il commencer par l’altruisme, cette notion qu’on a du mal à intégrer mais qui est pourtant une belle solution contre la haine. Car apprendre à se mettre à la place de l’autre, c’est aussi apprendre à voir de plusieurs angles de vues, ce que sont les degrés des réalités.
Cela dit je garde espoir, le meilleur est à venir.”