Yto Barrada, artiste franco-marocaine saluée pour son approche multidisciplinaire et ses réflexions percutantes sur des enjeux géopolitiques, a été choisie pour représenter la France lors de la 61e Biennale de Venise en 2026. Cette nomination confirme le statut croissant de Barrada comme l’une des figures les plus marquantes de l’art contemporain.
Née à Paris en 1971, mais ayant grandi à Tanger, Barrada a fait de sa double culture un fil conducteur dans son œuvre. Alliant photographie, textiles abstraits, films et installations, son travail explore des thématiques telles que la crise climatique, les migrations et le post-colonialisme. Parmi ses projets emblématiques, A Life Full of Holes (1998) documente la vie transitoire des migrants cherchant à rejoindre l’Europe, tandis que Iris Tingitana Project (2007) s’intéresse à l’histoire naturelle et culturelle de la région de Tanger.
Formée en sciences politiques et en histoire à la Sorbonne avant de se spécialiser à l’International Center of Photography de New York, Yto Barrada évolue à la croisée des disciplines et des frontières culturelles. Son engagement artistique a récemment été salué avec Le Grand Soir au MoMA PS1 : une exposition en plein air de cubes géométriques en béton coloré, incitant à réfléchir sur la révolution et la justice sociale. En 2022, lors de la Biennale de Whitney, elle présentait A Day Is a Day, un diptyque cinématographique explorant les effets du climat sur les textiles comme une métaphore du temps qui passe.
En parallèle, Barrada est aussi une activiste culturelle. Elle a cofondé en 2006 la Cinémathèque de Tanger, devenue un pôle artistique incontournable. Plus récemment, elle a lancé The Mothership, un espace collaboratif sur la côte tangéroise réunissant artistes, écologistes et botanistes autour des pratiques écoféministes panafricaines, avec une attention particulière aux teintures naturelles et aux techniques indigènes.
Sa nomination à la Biennale de Venise intervient après une année marquée par des prises de position fortes. En 2024, elle a retiré ses œuvres d’une exposition au Barbican de Londres en protestation contre l’annulation d’une conférence jugée politiquement sensible. « Nous ne pouvons pas prendre au sérieux une institution publique qui ne crée pas d’espace pour la réflexion libre et le débat », avait-elle déclaré, marquant son engagement intransigeant pour la liberté d’expression.
Alors que plusieurs autres pays, dont le Canada, l’Estonie et l’Irlande, ont également annoncé leurs représentants pour la prochaine Biennale, la sélection de Yto Barrada reflète une volonté de mettre en avant un art porteur de réflexion et d’utopie sociale.