Ce vendredi 4 octobre 2019 se sont ouvertes les Premières assises des industries culturelles et créatives dans le cadre agréable du à l’Hôtel Sofitel Jardin des Roses de Rabat. Après les allocutions des de Mohamed El Arj, ministre de la culture et e la communication, M. Habib El Malki, président de la chambre des représentants, M. Ahmed Rida Chami, Président du conseil Economique Social et Environnemental…Et de Neila Tazi (voir encadré), la parole fut donné aux actrices et acteurs de la Culture. Autour de trois panels, « richesse des identités culturelles, un capital à valoriser », « l’écosystème culturel en quête d’évolution » et « synergies et inclusion, leviers d’une nouvelle vision stratégique », pas moins d’une quinzaine experte et intervenante sur la scène culturelle ont confronté leurs expériences, analyses et réflexions autour de la Culture comme ciment identitaire et levier de développement.
La nouveauté c’st que c’est pour la première fois que le secteur étatique (ministère de la culture et de la communication) s’associe au secteur privé (Fédération des Industries Culturelles et Créatives) pour concocter une vision global et stratégique pour mettre en valeurs nos potentialités culturelles et Dieu sait quelles sont plus que nombreuses. «… une nouvelle perspective permettra d’établir une feuille de route constructive et collaborative favorisant l’émergence d’une industrie culturelle et créative génératrice de revenus, de valeur et d’emplois à travers l’ensemble de nos régions. »
Les débats, modérés par Thami Ghorfi, sont entrecoupés par des projections vidéo. Images et discours d’artistes venant illustrer les diverses contributions. Un show dédié à Dame Culture. Nous y reviendront sur les colonnes du prochain numéro Challenge hebdo. par Mohamed Ameskane
La parole est Mme Neila Tazi
Chers invités,
Mesdames et Messieurs,
C’est pour moi un immense plaisir et un grand honneur de m’exprimerdevant vous aujourd’hui à l’occasion de ces premières Assises des industries culturelles et créativesici au Royaume du Maroc, Terre des Cultures..
Je voudrais saisir cette occasion pour adresser mes sincères remerciementsà tous celles et ceux qui ont travaillé dur pour rendre ce rendez-vous possible. Aussi voudrais je saluer l’engagement audacieux du Ministre de la Culture et de la Communication Monsieur Mohammed El Aaraj d’avoir porté politiquement cet événement avec notre fédération. Je veux saluer l’engagement de la CGEM et tout particulièrement les membres du bureau de la jeune Fédération des Industries Culturelles et Créatives, fraichement constituée. Je veux enfin remercier le Secrétaire Général et les équipes du Ministère de la Culture pour ce partenariat exemplaire, car c’est de cette confiance mutuelle et de la volonté commune entre secteur public et secteur privé que viendra le changement.
Enfin, quel meilleur endroit que cette belle ville de Rabat pour débattre de l’enjeu des arts – de la culture –et deleur rôle dans le développement? Rabatdevenue capitale lumière !Rabat qui ambitionne de devenir le phare de l’Afrique et qui abrite en ce moment même sa 1ère Biennale des Arts qui connait déjà un immense succès.
Ces Assisesplacéessous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, témoignent de la détermination de notre pays d’inscrire les arts et la culture,et au delà,le capital humain, dans une nouvelle trajectoire, celle d’un modèle de développement où la culture devra évidemment prendre toute sa place.
Voilà plusieurs années que l’on clame, que l’on crie l’urgence.
Aujourd’hui nous avons dépassé le stade de l’urgence et nous sommes plus que jamais au carrefour de nos responsabilités, c’est à dire des décisions que nous devons prendre.
Ces assises sont la marque d’un tournant historique, elles montrent à la fois l’importance de l’enjeu, et l’ampleur du défi à relever.
Oui il s’agit aujourd’hui de poserles fondations d’une nouvelle dynamique basée sur les synergies et l’efficacité, une dynamiquedont les maîtres mots seront – comme le souligne Sa Majesté dans son discours du Trône –« essor » et « responsabilité ».
Aujourd’hui les industries culturelles occupent au niveau mondial la cinquième place dans la liste des secteurs les plus porteurs économiquement.
Nous ne pouvons donc plus considérer les dépenses et les investissements en faveur du développement culturel, comme des dépenses secondaires.
Le changement de perspective est nécessaire.
Il exige du courage et de la vision ; il suppose la création de nouvelles convergences entres les professionnels, et les décideurs économiques et politiques.
Mesdames et Messieurs,
Voilà bien des années que la culture n’est plus un secteur improductif vivant sous la perfusion des pouvoirs publics.
L’économie de la culture est non seulement une réalité, mais surtout, une chance. Des territoires, comme Bilbao, Essaouira, Avigon, des pays comme la Croatie ont retrouvé une vitalité portée par une communauté artistique bouillonnante et créative.
Des investisseurs comme ceux derrière les plateformes, Netflix,Deezerou encore Spotifyont bien compris la force de cette économie de la culture, et en donnent la leçon au monde entier.
Dans ces expériences, il y a deux lucidités à avoir.
– La première, c’est la lucidité fonctionnelle : un écosystème organisé pour nos artistes et pour nos talents, des sources de revenus nouvelles, généralement profitables aux jeunes, des créations d’emplois par milliers, des impulsions réelles aux arrivées de touristes, l’attractivité des territoires, une inclusion de fait des populations, une diffusion sans limite de l’envie d’apprendre et de comprendre.
Et puis, il y a la lucidité symbolique mais bien concrète : la culture, c’est la capacité à émouvoir le plus grand nombre.
Dans des ambiances réduites parfois au silence, la culture est ce qui permet de dire les maux sans blesser personne.
Chaque fois que la société se tait, c’est bien la culture qui fait résonner son silence.
Chaque fois que la politique se radicalise, c’est bien la culture qui remet à sa place la ligne médiane d’une société.
Chaque fois que l’économie se grippe, c’est bien la culture qui débloque les voies pour que l’air repasse.
Chaque fois que la diplomatie est isolée, c’est bien la culture qui reconnecte les chemins des retrouvailles.
Mesdames et Messieurs,
La culture est un enjeu transversal, elle est dans tout, elle est partout, elle n’est ni pour chacun ni même pour tous. Car derrière ces formules prometteuses, c’est trop souvent la culture pour les mêmes ou pour quelques-uns seulement ,celle qui exclut, qui isole et qui conduit à un processus d’intimidation sociale – en déniant à certains le droit de considérer leur propre culture comme légitime et digne de reconnaissance.
Conformément à la vision de sa Majesté le Roi, notre pays manifeste une ambition renouvelée de faire de la culture un levier de développement et de prospérité partagée.
En témoigne la politique des musées, des théâtres, des festivals … des événements de standards internationaux portés par toute une filière de métiers où l’artiste côtoie l’artisan, l’ingénieur côtoie l’écrivain et le poète, l’éditeur côtoie l’architecte et le désigner.
Ces événements certes ne suffisent pas mais ils sont l’expression d’un élan qui invite chacun de nous à saisir la dynamique culturelle pour en faire une des forces motrices de l’émergence et du développement harmonieux de notre pays.
Mesdames et Messieurs,
Je connais bien la solitude de l’acteur culturel, le désarroi face au manque de moyens, et puis, la joie de retrouver la paix quand l’acte de créer prend des formes.
Je souhaite que ces Assises représentent un tournant dans la dynamique culturelle de notre pays. Qu’elles favorisent enfin l’émergence d’une vraie industrie culturelle forte, moderne, structurée, soutenue par les pouvoirs publics et par le secteur privé, créatrice de richesse et apporteuse de progrès.
Nous exigeons que la culture soit au cœur du nouveau modèle de développement. La culture n’est pas un luxe, c’est un droit élémentaire, un nécessaire de citoyenneté.
Je compte sur vous, chers participants, pour nourrir ces assises de vos idées, de vos recommandations, de votre énergie et de votre passion. C’est un moment rare et précieux. Nous n’avons pas le droit de rater ce rendez-vous.
A nous de l’exploiter intelligemment pour nous faire entendre, pour nous faire comprendre et pour qu’enfin, la culture soit érigée en priorité nationale, au même titre que l’industrie, l’infrastructure ou l’éducation.
Aujourd’hui, je sais que nous pouvons, toutes et tous, dans ces Assises, répondre à cette ambition, d’inscrire la culture dans une nouvelle dynamique de progrès.
Et je vous remercie.
*Allocution de Mme Neila Tazi, Présidente de la Fédération des industries Culturelles et Créatives.