Dans le cadre du programme Ramadanyate, initié par Book Club Le Matin, le Sofitel Rabat a reçu le mardi 4 avril 2023 Faouzi Skalli pour présenter «Le face à face des cœurs, le soufisme d’aujourd’hui». Une veillée ramadanesque, modérée par Souad Badri, ô combien spirituelle!
Ecrivain, Anthropologue et Président du Festival de la Musique Soufie, Faouzi Skalli ne passe pas inaperçu. Figure incontournable du paysage culturel, il ne cesse, à travers ses écrits, ses conférences et autres festivals de faire le plaidoyer du soufisme comme vision du monde et antidote contre l’intégrisme et l’intolérance. Parmi ses initiatives, citons en exemple, le colloque international «Une âme pour la mondialisation», organisé depuis 2001 en parallèle du Festival de Fès des musiques sacrées du monde. Une rencontre qui tend à devenir une sorte de contrepoint aux forums mondiaux économiques et sociaux.
Auteur francophone prolifique, on lui doit, entre autres, «La Voie soufie», Albin Michel, Spiritualités Vivantes, 1985, «Traces de lumière, paroles initiatiques soufies, Albin Michel, Spiritualités Vivantes, 1996, «Saints et sanctuaires de Fès», éd. Marsam, 2007, «Moïse dans la tradition soufie», Albin Michel, 2011 et «Le Face à face des cœurs, le soufisme aujourd’hui», Editions du Relié, 2000, Presses Pocket, 2002.
Le soufisme, un état d’être
Depuis sa lecture du «Livre du dedans» de Jalâl ud Dîn Rûmî et sa rencontre avec Sidi Hamza al Qâdiri al Boutchichi, dont il devient le disciple, Faouzi Skalli nage dans l’océan de la mystique musulmane. Au fil des ans, des recherches et des initiatives, il devient incollable sur le sujet. C’est devant un parterre de personnalités, d’hommes et de femmes des lettres et des arts qu’il a survolé le sujet traitant mille et une questions liées au soufisme, à son histoire, à ses figures et surtout aux réponses qu’il peut offrir pour donner sens à un monde qui a l’air de perdre la boussole.
Le soufisme, à travers son héritage, ses déclinaisons littéraires et artistiques, est un patrimoine mondial de l’humanité. Qu’il soit d’Orient ou d’Occident, ses grands noms véhiculent une sagesse et un humanisme qui transcendent cultures et frontières. Les Ibn al Farid, Hllaj, Jala Eddine Rumi, Ibn Arabi, Ibn Ajiba, Abou Yaâza Yennour, Abou Medyene El Ghaout, Chams de Tabriz et autre Farid Eddine El Attar sont, au-delà de leur appartenance territoriale et religieuse, des figures universelles.
Des soufis qui ont de tout temps vécu leur foi avec humilité et ferveur en respectant la pluralité des pensées. Leurs écrits, leur sagesse, imprégnée par l’ invitation à l’hospitalité et à la tolérance, sont d’une actualité brûlante. D’après Faouzi Skalli, on peut y trouver des réponses aux grands défis du monde à l’ère mondialisée et globale.
Il évoque l’environnement et l’écologie, le transhumanisme et les migrations, l’intégrisme et son corollaire le terrorisme…S’appuyant sur l’histoire de la mystique musulmane, il en dresse les pages brillantes, les pages d’un islam de lumière. Une religion qui ne s’oppose pas aux acquis de l’humanisme mais lui insuffle une âme. On croit revivre les débats autour du rapport, entre foi et raison, qui ont marqué l’histoire de la civilisation musulmane entre Ghazali, Averroès et Ibn Arabi.
De là, le besoin d’associer savoir et spiritualité, science et sagesse car la «Science sans conscience n’est que ruine de l’âme». Parmi les sujets d’actualité, les développements foudroyants et inouïs de l’intelligence artificielle. Faouzi Skalli disait déjà que «Sans spiritualité, la pente des NTIC actuelle nous amène d’une façon certaine vers le remplacement pur et simple de notre humanité par une post-humanité supposée supérieure et plus performante.» De là, son appel pour l’émergence d’un humanisme spirituel.