Pierre Rainero, Directeur « Image,Style et Patrimoine » chez Cartier revient dans cet entretien sur l’esprit cartier, sur la dernière collection horlogère drive de cartier, présentée lors de l’événement Pitti Uomo à Florence en italie. D.N.E.S BOUTAINA BENSOUDA
Vous êtes Directeur « Image, Style et Patrimoine »: quel est votre rôle chez Cartier?
Mon rôle central est lié au mot « Style » dans ce titre, qui désigne ma fonction principale dans le processus créatif de la Maison et qui me charge de me prononcer sur tous les projets au nom d’une vision du style de la Maison. Cette vision, quand on est chez Cartier, réside dans la connaissance de l’histoire de ce style, de la manière dont il s’est constitué avec le temps. C’est ce lien avec le patrimoine qui est important. On ne peut se prononcer sur le futur du style que si l’on connait le « pourquoi » et le « comment », la manière dont il s’est constitué.
Durant Pitti Uomo, vous avez présenté la nouvelle collection horlogère Drive de Cartier.Combien de modèles compte-elle ?
Cette collection compte 7 modèles, avec des boîtiers en or rose ou acier et des cadrans noirs, gris ou blancs.
3 mouvements Manufacture Cartier y sont représentés : le premier avec heure, minute, petite seconde et date, le deuxième avec second fuseau horaire, indicateur jour et nuit, grande date et petite seconde, et enfin, nous proposons un modèle Haute Horlogerie certifié Poinçon de Genève, équipé d’un tourbillon volant.
Quel est le processus de création d’une nouvelle collection horlogère et les défis que vous rencontrez?
Le processus est relativement simple : on commence par l’idée de développer une nouvelle montre, en l’occurrence puisqu’on parle de Drive, une nouvelle montre de forme spécifiquement masculine. Ensuite, il y a les défis communs à tous les objets Cartier qui se posent : la réaction que l’on attend de nos clients quand ils verront l’objet, c’est le désir. Et cette désirabilité se traduit par différents paramètres. Le premier, c’est que l’objet respecte éminemment les codes de la Maison, que les gens s’exclament « Cet objet est très Cartier ». Deuxièmement, on souhaite que l’objet soit beau. On pourrait se dire qu’une création Cartier c’est justement ça déjà, un bel objet. Travailler avec un style, c’est comme une langue vivante, où on s’exprimerait avec lui pour créer un sentiment de beauté. C’est le défi permanent : créer à l’intérieur de ce style existant, le faire évoluer tout en continuant à créer de très beaux objets. Et effectivement pour l’horlogerie en particulier, le travail sur la forme est très important car c’est ce qui est distinctif chez Cartier, ce que la Maison apporte au monde horloger : les montres de formes.
Qu’est-ce qui vous inspire pour une nouvelle création?
Ce qui est inspirant pour une nouvelle création, et c’est de toutes manières le défi qui se pose à Cartier, ou devrais-je dire une responsabilité et un défi : apporter quelque chose de nouveau non seulement au patrimoine de Cartier, mais également dans le domaine dans lequel on opère. Et cela, je dirais que c’est non seulement inspirant, mais aussi stimulant. C’est ce qui nous stimule réellement, cette volonté d’apporter du nouveau en permanence. C’est l’univers tout entier qui nous entoure qui est inspirant : on crée des objets et on veut qu’ils soient désirés non seulement parce qu’ils sont beaux, mais aussi parce qu’ils donneront l’envie de vivre avec.
Cela nous oblige à être curieux et à suivre l’évolution des modes de vie des gens, de comprendre comment ils réagissent. C’est donc le monde entier, le monde en soi, qui nous inspire.
Comment décririez-vous l’homme à qui cette nouvelle montre est destinée?
C’est une question à laquelle il me parait impossible de répondre, et je pense que nous n’avons pas le désir de définir un seul homme en particulier. Notre vocation est de créer un bel objet. Et on a l’audace de penser que les beaux objets peuvent intéresser vraiment différentes personnes, avec des styles de vie distincts. D’ailleurs, cela est reflété dans l’articulation de la présentation ici à Florence: on le voit par exemple dans le «Dressing» [salon décoré avec des dessins de Konstantin Kakanias et plusieurs looks thématiques créés par le lifestyler Sergio Colantuoni]. Un créatif illustrateur a inventé différents univers, avec une présentation où l’on voit des styles de vie multiples, totalement imaginés pour montrer à quel point la montre Drive peut s’insérer dans des styles de vie extrêmement divers.
Et ça, c’est notre vocation : on s’adresse donc beaucoup plus à la partie sensible de l’homme qu’aux exigences en termes de qualité, de technique, sans «qualifier» un style de vie. Dire qu’il y a un homme Cartier? Je ne pense pas. Mais je pense qu’ il y a une motivation commune, en tous cas chez beaucoup d’hommes, à s’intéresser aux beaux objets.
Comment avez-vous trouvé l’ambiance à Florence pendant Pitti Uomo? Est-ce que cela vous inspire?
L’ambiance est à la fois très internationale et très italienne. Très internationale, car elle attire des gens du monde entier : on y trouve à la fois des stylistes, de la presse…tous ceux qui s’intéressent de façon générale à l’univers masculin. Florence est aussi extrêmement italienne, c’est la quintessence de la culture historique et artistique de l’Italie. Et avec cet aspect de modernité – en raison de ce bouillonnement de création – qu’on apprécie beaucoup et avec lequel on est totalement en phase.
Avez-vous prévu de revenir à Florence pendant un prochain Pitti Uomo ?
Rien n’est planifié : cette année, on avait cet objet qui est la montre Drive à présenter, on voulait communiquer à l’occasion du Pitti Uomo notre vision de l’élégance masculine. Je pense que l’on ne reviendra que dans la mesure où il y aura une nouveauté à présenter, un objet qui fait sens.
BIO EXPRESS
Né en 1958, Pierre Rainero, diplômé d’HEC (École des Hautes Études Commerciales, Paris) débute sa carrière dans la publicité en 1980 chez Ogilvy & Mather.
Il rejoint Cartier à Paris en 1984 et prend la responsabilité de la publicité internationale. Après quelques années en tant que Directeur Marketing et Communication pour Cartier en Italie, il rentre à Paris pour prendre la tête des départements Recherche et Stratégie, Communication et Direction Artistique des créations Cartier au sein de Cartier International. Il est responsable de tout ce qui relève de l’image de la Maison.
Depuis 2003, il est Directeur « Image, Style et Patrimoine ». Il supervise toutes les questions relatives à la stratégie, à la création et l’image chez Cartier, et est également responsable du département Patrimoine. À ce titre, il est à la tête de la Collection Cartier qui est constamment enrichie et rassemble aujourd’hui plus de 1 500 pièces historiques. Il est l’interlocuteur privilégié des musées et des institutions culturelles du monde entier, pour les expositions dédiées aux créations Cartier.