Robert, the Great

by La Rédaction

Acteur formidable doublé d’un réalisateur hors pair, Robert Redford fait partie d’une génération presque éteinte, celle des Paul Newman, Clint Eastwood, Gene Hackman, Robert Duvall et tant d’autres. Icône incontournable, c’est aussi un homme engagé et visionnaire. Sundance Festival témoigne de sa lutte contre la médiocrité et l’hypocrisie du monde moderne.


   

Redford et son cinéma

« J’amène forcément Robert Redford dans chacun de mes films, mais c’est tout. J’ai toujours pensé que les critiques n’ont pas assez remarqué à quel point j’ai sans cesse cherché à interpréter des rôles différents. Vous parliez de Jeremiah Johnson, film après lequel j’ai tourné Votez McKay (Michael Ritchie, 1972). Or on ne peut pas trouver deux personnages plus opposés. Puis j’ai joué dans Nos plus belles années (Pollack, 1973) avant de faire Gatsby le Magnifique (Jack Clayton, 1974).

« Dans ma tête, ça n’a jamais été aussi clair. Ce que je savais à l’époque, c’est que je souffrais d’être cantonné dans certains rôles et jugé uniquement sur mon physique. C’est ce qui m’a poussé à essayer des choses nouvelles, à brouiller les pistes. Quand je vais voir un film avec Clint Eastwood, je sais exactement à quoi m’attendre. Ce n’est pas un reproche, mais je sais à quoi ressemblera son personnage. Pour ma part, j’ai au contraire toujours cherché des trucs différents dans les films que je faisais. »

Redford et l’époque moderne

« J’ai besoin de subtilité et notre époque en manque cruellement, surtout en matière d’art. Convenez avec moi que les films contemporains, surtout les blockbusters, ne sont pas très nuancés. Tenez, voilà. Vous qui me demandiez ce qui rassemble mes films, ce qui peut donner un sens à ma filmographie, c’est peut-être ça :
la subtilité ou, en tout cas, la reconnaissance de la
complexité du réel. Au fond, tous mes films parlent de l’Amérique, mais pas de l’Amérique vantée par les slogans d’après la Seconde Guerre mondiale, pas de l’Amérique des vainqueurs. »

Robert Redford et l’enfance

« J’ai grandi dans un milieu ouvrier. Mes parents n’avaient pas beaucoup d’argent, et j’ai vu comment cela les affectait. Cela m’a marqué, je me suis très tôt dit que je ne voulais pas vivre la même vie. Pour cela, je ne devais dépendre de personne. Cela a dû influencer ma vision des choses. »

« J’ai des souvenirs très vivaces de mon enfance. J’habitais avec mes parents dans la banlieue ouvrière de Van Nuys, à Los Angeles, et les histoires qu’on me racontait à l’époque vantaient la grandeur de mon pays. J’ai grandi dans un univers repeint aux couleurs patriotiques : rouge, blanc, bleu. Ce que l’on tentait de nous faire entrer dans le crâne à l’époque, c’était que l’important ne résidait pas dans le fait de gagner ou de perdre mais dans la façon dont on jouait le jeu. Cependant, j’ai très vite compris que tout cela n’était que mensonges : ce qui comptait aux États-Unis était bel et bien de vaincre. C’est pour cette raison que j’ai voulu interpréter ou mettre en scène des histoires sur l’hypocrisie, les illusions, le mensonge. Mon pays refuse d’affronter sa complexité et préfère se bercer d’histoires simples et schématiques. J’adore les États-Unis mais je veux montrer la vérité, décrire ce pays tel que je le vois. »

Redford et lui-même

« J’ai surtout découvert que j’étais un bel hypocrite ! J’ai dit plusieurs fois que je ne voulais plus faire l’acteur et, voilà, je continue à le faire. J’ai débuté ma carrière comme simple comédien et j’adorais ça mais au fil des ans, a grandi en moi le désir de jouer dans des films dont je pouvais contrôler l’histoire et la mise en scène. Je suis devenu réalisateur et producteur mais tout récemment, j’ai senti que la singularité de la seule fonction de comédien me manquait à nouveau. All is Lost a été le début de cette nouvelle envie de revenir à quelque chose de plus simple, être acteur sans aucune autre responsabilité. Quand J.C. Chandor est venu me parler de ce projet, son script ne faisait que 30 pages et j’ai d’abord eu peur du challenge : j’allais faire moi-même mes cascades, passer du temps sous l’eau, ne dire aucun dialogue mais c’était un retour aux fondamentaux de mes débuts et ça m’excitait. Pas d’effets spéciaux, pas de voix off, juste une expérience de cinéma épuré dont j’allais faire partie. À la fin du tournage, j’ai réalisé à quel point j’adorais juste faire l’acteur. ».

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